Décarbonation de l’industrie : lancement du démonstrateur Ch0C

Remarquée lors de la première édition du congrès Allice en 2021, la chaudière gaz industrielle bas carbone – Ch0C – revient sur l’édition 2023. Des membres du consortium ont présenté les avancées exceptionnelles du projet. Cette solution, qui associe une efficacité énergétique maximale et la séquestration du CO2 est lauréate de l’appel à projet France 2030 DEMIBaC. La construction d’un démonstrateur industriel est lancée.

20 % de la consommation mondiale d’énergie sert à produire de la chaleur industrielle. Avec près de 70 % de la consommation d’énergie de l’industrie française dévolue aux procédés thermiques, la chaleur représente le premier axe de décarbonation. Le projet Ch0C apporte une solution en travaillant sur le double angle de l’efficacité énergétique et de la récupération-valorisation du CO2.

« Le projet Ch0C a pour objet de concevoir, fabriquer, installer et exploiter un prototype industriel autour de la conception innovante d’une chaudière et de son écosystème pour permettre la décarbonation de la production de vapeur à partir de gaz et produire très peu de CO2. Tout l’intérêt de cette innovation est qu’elle se construit par accumulation de briques technologiques matures, ce qui permettra d’aller très vite. Le défi est de faire fonctionner ensemble ces briques », a souligné Pascal Morawski, directeur commercial de Babcock Wanson, lors de son intervention au congrès Allice au nom du consortium.


Lancé en 2022, ce projet est lauréat de l’appel à projet France 2030 DEMIBaC. Dans un courrier adressé au consortium cet été, la Première ministre en a salué la grande qualité et souligné que le démonstrateur s’inscrit « pleinement dans les objectifs de réduction des émissions fixées par France 2030 et la stratégie nationale d’accélération de la décarbonation de l’industrie fixé par la Stratégie nationale bas carbone ». Jugez plutôt.

 

Une technologie innovante capable de capter au moins 90 % des émissions directes de CO2

La Ch0C - chaudière gaz industrielle bas carbone - pourrait réduire de plusieurs millions de tonnes par an les émissions de CO2 en France. Le démonstrateur industriel, dont la construction a déjà été lancée et qui sera installé sur une plateforme chimique de l’Oise, devra confirmer la capacité de la Ch0C à réduire de plus de 90 % les émissions directes de CO2 des chaufferies industrielles pour les usages vapeur et eau chaude.

 

Infographie chaudière ch0c

 

Le démonstrateur se compose d’un ensemble d’éléments :

  1. La chaudière vapeur utilise le principe de l’oxycombustion, avec une température de flamme comparable à celle d’une chaudière classique grâce à la recirculation d’une partie des produits de combustions. Pour rappel, l’oxycombustion est une combustion dans laquelle l’air ambiant, utilisé habituellement comme comburant, est remplacé par de l’oxygène (O2).
  2. Elle est équipée d’économiseurs et de condenseurs qui permettent d’atteindre un rendement supérieur à celui d’une chaudière classique.
  3. Une boucle de recirculation sur les brûleurs permet de concentrer le CO2 produit.
  4. Un système de captage et de liquéfaction de CO2, sans produits chimiques, complète cette installation afin d’en permettre la valorisation. En effet, grâce à cette oxycombustion, les fumées recirculées contiendront, avant évacuation de l’eau, environ 85 % de CO2 en sortie de chaudière, contre 10 % seulement avec une combustion en air ambiant. Ainsi concentré, le CO2 sera plus facile à capter.
  5. Enfin, parfaitement inscrite dans son écosystème, la Ch0C permettra de fournir du CO2 vers les futurs voies de valorisation et pourquoi pas valoriser l’oxygène fatal – dérivé de la production d’hydrogène par électrolyse.

Un consortium de 16 entreprises alliées pour le développement de la Ch0C

Un consortium de 16 entreprises, essentiellement françaises, coordonné par Naldeo Technologies et industries, soutient et suit avec le plus grand intérêt le projet Ch0C. Il réunit des industriels de l’offre (Babock Wanson, Fives Pillard, Verdemobil, Biogaz), des énergéticiens (GRDF, GRTgaz, Total Énergies, Engie Solutions) et des experts scientifiques (Université de Paris, Carbonéo), mais aussi des industriels de la demande représentant les secteurs comme les métaux, ou l’agroalimentaire entres autres : Agrial, Agro Mousquetaires, Bonduelle, Coca-Cola, Constellium et Eiffage.

Le consortium s’est donné 15 mois pour construire la Ch0C, l’installer et la mettre au point sur le site, faire les essais et les analyser. Les conclusions de cette opération de démonstration devraient être délivrées fin 2024. « Nous estimons le potentiel à plus de 1 000 chaudières industrielles en France. Nous sommes très optimistes quant à notre capacité à démontrer la pertinence de ce concept. Nous sommes fiers qu’une filière d’excellence française puisse déployer une solution efficiente bas carbone pour des utilités industrielles en Europe. Cela s’inscrit parfaitement dans les objectifs de France 2030 », conclut Pascal Morawski.

 

Témoignage d’un futur utilisateur

Ce qui est intéressant, avec le projet de chaudière Ch0C c’est qu’il mêle différents leviers de décarbonation : l’intégration d’énergies alternatives dès lors qu’on la fait fonctionner avec du biométhane, l’efficacité énergétique et le captage et la valorisation du CO2 grâce à l’oxycombustion. En outre, c’est une technologie qui sera rapidement exploitable, ce qui est essentiel au regard de l’urgence à décarboner l’industrie.
 

Arnaud Lallemant - Directeur du site de Socx / Coca-Cola (CCEP France)

 

Une solution qui permettrait de réduire notre empreinte carbone et de valoriser in situ le CO2  

Nous avons conduit à l’échelle de l’usine de Socx/Dunkerque, plus gros site Coca-Cola de France, une étude d’ingénierie globale pour définir notre feuille de route décarbonation à trois ans. Nous voulions nous assurer d’avoir investigué l’ensemble des technologies et innovations en cours de développement aujourd’hui. Nous attendons désormais 2024 avec une grande impatience et beaucoup d’espoir. La Ch0C, parce qu’elle réduit les émissions de carbone de 90 % grâce à l’oxycombustion et intègre la captation/filtration du CO2 à la source, s’insère totalement dans notre feuille de route.

Le site de Dunkerque consomme annuellement environ 25 GWh en gaz 25 GWh en électricité renouvelable. D’importants efforts d’efficacité énergétique ont déjà été faits, notamment en mettant en place des boucles de récupération de chaleur sur les groupes froids et les compresseurs, mais la production de vapeur reste un fort enjeu. Ce n’est toutefois pas le seul aspect qui rend la Ch0C intéressante pour l’usine, qui fabrique plus de 10 marques de boissons plates et gazeuses.

Le marché du CO2 alimentaire étant très tendu, nous faisons évoluer nos procédés de gazéification. Nous avons ainsi pu substituer le gaz carbonique par de l’azote dans certains produits, qui présente moins d’impact carbone. La perspective de réemployer directement dans l’usine le CO2 capté par la Ch0C – élevé au grade alimentaire pour être valorisé in situ - serait décisif dans la réduction de notre empreinte carbone.

 

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