Je vous parle régulièrement d'énergies renouvelables et de transition énergétique sur cette chaîne. Et aujourd'hui, nous allons aborder la question du gaz. Un sujet sensible en ce moment
sur lequel il est urgent, et surtout possible, de revoir notre copie.
Nous n'allons donc pas nous focaliser sur le gaz que l'on puise dans le sous-sol de notre planète, mais plutôt de celui que l'on peut produire de manière plus vertueuse : en utilisant de la matière organique produite dans les exploitations agricoles et en la transformant.
Un processus plus connu sous le nom de méthanisation !
Vous le savez, nous devons limiter notre impact sur l’environnement. C’est pour cette raison que je vous parle régulièrement de transition énergétique et d’énergies renouvelables.
Si d’ailleurs vous souhaitez que nous continuions à aborder ces sujets, signalez le en likant cette vidéo… Je disais donc limiter notre impact sur l’environnement et notamment les émissions de gaz à effet de serre. Aujourd’hui on s’attaque à un gros morceau: le gaz.
Il existe une façon vertueuse de le produire… comment ? En transformant de la matière organique issue des exploitations agricoles, un processus plus connu sous le nom de méthanisation.
Comment on fait? je vous explique tout ça … ça urge!
1 / Atelier meuble / Les enjeux actuels du gaz
Jamy passe devant des objets/maquettes de ces différents usages (chauffe eau, plaques de cuisson, voiture/camion GNV)
Le gaz, ou plus précisément le méthane, C-H4 est une source d'énergie que nous utilisons dans de nombreuses situations : Pour se chauffer, pour cuisiner, et même pour se déplacer.
C’est aussi une source d’énergie qui se stocke facilement. Le méthane est donc aussi utilisé pour faire tourner des turbines dans des centrales et ajuster la production électrique, notamment lors des grands pics de consommation,comme en hiver.
Le revers de la médaille, c’est que, ce que nous appelons pudiquement “Le gaz naturel”, est une énergie fossile avec tout ce que cela entraîne.
C'est un hydrocarbure, au même titre que le pétrole, qu'il faut extraire du sous-sol, transporter jusqu'au lieu de consommation et brûler afin qu'il libère son énergie... mais au passage il libère aussi du CO2. Un gaz à effet de serre responsable des dérèglements climatiques.
Précisons que la ressource n’est pas infinie. Elle est limitée, non renouvelable à échelle humaine. Enfin il ne vous aura pas échappé que l’accès à cette ressource est soumise aux aléas géopolitique parfois plus que tendus.
La Russie possède par exemple près d'un quart des ressources mondiales.
2 / Atelier bar / Produire mieux : la méthanisation /
Difficile malgré tout de se passer de gaz dans l'absolu. On l'a vu : pour se chauffer, pour cuisiner, pour produire de l’électricité, nous en avons encore besoin. Mais dans le même temps, il est urgent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et d'être moins dépendant de certains pays.
La bonne nouvelle, c'est qu'il existe des pistes pour faire pencher la balance du bon côté.
Il s'agit de produire ce qu'on appelle du biogaz !
Pour y voir plus clair, je vous emmène à la ferme.
3 / Terrain / Découverte de la méthanisation
Jamy devant un pâturage de vaches (exploitation à côté de JF Delaittre + petit clip possible de Jamy passant devant des tournesols.)
Vous l'avez compris, ici on est loin des images classiques des sites d'extraction de gaz. Pas de derrick ni de forage profond, et pour cause, on ne va pas chercher le gaz dans le sol, mais plutôt SUR le sol.
Panneau vers les pieds de Jamy pour découvrir une bouse de vache à côté du pied gauche.
C'est tout le principe de la méthanisation : se nourrir des déchets qu’on appelle organiques, issus du vivant en quelque sorte, pour produire du gaz. Et c’est une des premières raisons pour laquelle la méthanisation se marie si bien avec l’agriculture : il suffit de se baisser pour récupérer la matière première.
On peut utiliser des effluents d’élevage, des bouses de vaches pour être plus clair, des déchets de cultures, la partie des végétaux qu'on ne consomme pas, ou même des cultures intermédiaires, des plantations qu’on sème entre deux récoltes pour maintenir le sol en bon état.
Qu’on les récupère où qu’on les laisse sur le terrain, tous ces déchets finissent inévitablement par pourrir et relarguer le carbone qu'ils ont accumulé durant leur vie. L'idée c'est donc de capter ce carbone… sous forme de méthane.
Un petit “C” s’échappe d’un tas de déchets organiques ou d’une bouse de vache. Puis un “H4”vient s’y accoler.
Mais pour y parvenir, il faut donner un petit coup de pouce à la nature.
Je vous explique tout ça dans l'atelier !
4 / Atelier / Le principe de la méthanisation / 2 minutes
Jamy devant une maquette des installations d’un site de méthanisation.
Possibilité de le faire de manière ludique et symbolique : un jouet tracteur et une casserole couverte par exemple.
Cette fameuse matière organique récupérée dans les champs alentour est composée essentiellement de Carbone, d’Hydrogène et d’Oxygène : C-H-O.
Elle est introduite progressivement et régulièrement dans une cuve fermée qu’on appelle un digesteur où elle est maintenue à 40° et brassée en continue.
Jamy s’apprête à soulever le couvercle de la maquette du méthaniseur
Un dernier point avant de jeter un œil à ce bouillon de culture : la transformation s’effectue en l’absence d’air. C’est un fonctionnement dit anaérobie qui va favoriser le développement et le travail de différents types de bactéries.
Ces bactéries se développent naturellement et vont se succéder pour découper la matière organique, la digérer, transformer et recombiner ses composants jusqu’à obtenir au bout de quelques dizaines de jours du biogaz : C’est à dire essentiellement du méthane et du dioxyde de carbone.
CH4 et CO2 apparaissent en sortant de la marmite/digesteur.
Vous noterez qu’on retrouve toujours le C, l’ H et l’ O contenu au départ dans la matière organique… tout se transforme comme on dit.
Alors évidemment, même si le processus est tout à fait naturel, il faut malgré tout une installation pour maîtriser ce processus, l'optimiser et le faire en toute sécurité. Mais il faut aussi un certain savoir-faire.
On retourne à la ferme, et cette fois-ci, on a rendez-vous avec le maître des lieux.
5 / Terrain / L’enjeu de l’approvisionnement
Jamy et Jean-François devant le digesteur + clip ou images drones des installations.
Bonjour Jean-François, merci de m’accueillir sur ton exploitation !
Ici nous sommes justement devant le digesteur, là où tout se passe… et c’est un peu plus gros que sur ma maquette.
Tu peux nous donner une idée du volume de la bête et de la quantité de déchets que cela absorbe ?
Jean-François : XXXX m3 et 22 000 tonnes /an.
Ah oui quand même ! ça fait à manger pour les petites bactéries.
Et donc toi, tu es avant tout agriculteur (on a vu tes beaux champs de tournesols notamment à côté), et ces 22 000 tonnes, elles proviennent de ton exploitation ?
Jean-François :
En partie oui, mais je récupère aussi les déchets de 3 autres collègues, dont l’éleveur de vaches juste à côté. Donc 4 exploitations au total. Mais ce n’est pas tout, j’intègre aussi des déchets de l’industrie agroalimentaire et aussi les biodéchets des communes alentour.
Les biodéchets c’est ce que les particuliers mettent de côté quand ils font la cuisine par exemple et qui est récolté, puis convoyé jusqu’à chez toi c’est ça ?
Jean-François :
Exactement
Alors avec ces biodéchets de particuliers, d’autres issus de tes cultures, des élevages… ça ne complique pas un peu la gestion de l'approvisionnement et l’alimentation du digesteur ?
Jean-François :
Au contraire, d’une part cela augmente la production de gaz, et d’autre part cela assure un approvisionnement continu. Parce qu’il n’y a pas de bouton off sur le digesteur, ou même sur les bactéries. Il faut alimenter en continu toute l’année.
Tu me montres comment ça se passe ?
Jean-François :
On y va.
OPTIONNEL :
Ici on est en début de chaîne de méthanisation, et comme tous les jours il faut alimenter le digesteur avec de la matière première. Ca se passe comment, on prend tout et on met dedans ?
Jean-François :
Alors pas exactement non plus. On va déjà trier un peu, histoire de ne pas avoir d’éléments indésirable, comme du métal, du plastique qui se serait glissé dans nos déchets organiques. Mais on va aussi veiller à un certain équilibre des intrants : pas trop sec, pas trop humide. Donc la diversité des sources de déchets, ça aide aussi à trouver le bon équilibre.
Bon, je mets le contact et tu me guides ?
Jean-François :
ça marche
Clip Jamy apprend à se servir d’une chargeuse et charge des intrants dans le digesteur.
Et bien voilà, les bactéries devraient avoir de quoi travailler pour un moment.
En attendant, on va faire le point sur la suite des opérations.
6 / Atelier meuble / Du biogaz au biométhane /
Jamy revient dans l’atelier avec un brin de paille dans les cheveux
Comme nous le disions, à la fin du travail des bactéries dans le digesteur, on se retrouve en présence de biogaz : En grande partie du CH4 et du CO2.
Il remarque son brin de paille et le retire.
Après un petit nettoyage, ce gaz peut être directement utilisé sur l’exploitation pour faire tourner une turbine et produire de l’électricité, ainsi que de la chaleur.
Jean-François lui a opté pour l'injection dans le réseau. C'est-à-dire qu’il va vendre sa production et l’envoyer dans le réseau classique de gaz.
Un choix qui permet d’alimenter de nombreux foyers mais qui demande quelques opérations supplémentaires.
Typiquement, il va falloir débarrasser le biogaz de son CO2 pour en faire du biométhane utilisable par les équipements domestiques .
Pour y parvenir, la technique la plus utilisée s’appelle la séparation membranaire.
Je m’explique :
Une molécule de CO2 est plus petite qu’une molécule de méthane, CH4. Pour les séparer, et surtout pour ne garder que le méthane, il suffit de placer une membrane qui va agir comme un filet. Ou comme un tamis si vous préférez.
Jamy prendun tamis et verse une poignée de sable/gravier.
Ses mailles seront suffisamment grandes pour laisser s’échapper le CO2, et suffisamment petites pour retenir le méthane.
Dernière chose, le méthane étant inodore à l’état brut, il reste à ajouter - pour des raisons de sécurité- l’odeur typique du gaz. Cette odeur de souffre qui nous permet d'identifier rapidement une fuite.
7 / Atelier / La place du biométhane dans la transition /
Jamy 2 : Respire à nouveau un ballon mais parle normalement.
Mais on est d’accord que ce biométhane, une fois chez moi, il est quand même brûlé par ma cuisinière, ou par mon ballon d’eau chaude. Donc il dégage du CO2.
Il regarde son ballon et remarque que cela ne fonctionne pas sur sa voix…
Une fois acheminé jusqu’à chez nous, ce biométhane est tout de même brûlé par notre cuisinière ou notre ballon d’eau chaude. Il dégage donc du CO2.
Alors quel est l’intérêt d’une telle énergie ?
Et bien, la grande différence c’est qu’il ne s’agit pas d’une énergie fossile.
Le gaz dit “naturel” est un hydrocarbure. C'est-à -dire qu’il est extrait du sous-sol, où il était piégé depuis des millions d’années. Lorsqu’il est brûlé, il libère donc du carbone, du CO2 supplémentaire dans l’atmosphère.
A l’inverse le biométhane, ou le biogaz en général, s’inscrit dans un cycle court.
Regardons sur une année par exemple : le carbone de l’atmosphère est capté sous forme de CO2 par une plante en pleine croissance : Elle l’utilise pour pousser. Lorsque vient la récolte, le carbone stocké dans sa tige, dans ses feuilles, est récupéré pour former du biogaz. Ce dernier relargue alors le CO2 précédemment capté par la plante lorsqu’il est brûlé.
Finalement, il n’y a pas d’introduction de CO2 supplémentaire dans l’atmosphère… On fonctionne en circuit fermé… et ça change tout.
Mais ce n’est pas le seul avantage de la production de biogaz. Car vous allez voir, les agriculteurs trouvent un autre intérêt à la méthanisation.
8 / Terrain / Le digestat : un cercle vertueux
Nous l’avions un peu mis de côté, mais les 22 000 tonnes de matière organique introduites dans ce digesteur chaque année ne se transforment pas intégralement en gaz. Loin de là.
En réalité, il reste environ 19 000 tonnes de résidu solide et liquide que les bactéries ont aussi décomposé qu’on appelle le digestat.
On va allez voir ça de plus près.
Jamy retrouve Jean-François devant la fosse de digestat.
Alors Jean-François, ce digestat tu le mets de côté ici, dans ces immenses fosses, mais pour quoi faire ?
OPTIONNEL :
Jean-François :
Et bien on va le laisser s’aérer un peu, tout en le protégeant et en protégeant l'environnement et on va le laisser se composter, se stabiliser pour obtenir un fertilisant.
Un fertilisant, c'est-à -dire ?
Jean-François :
Et bien ce résidu, c’est de la matière organique en décomposition qui a l’avantage d’être très riche en azote notamment. Donc à condition de respecter certaines logique d’épandage, ça enrichit considérablement les sols entre deux cultures.
Donc là, chaque année, en plus du gaz, tu produis 19 000 tonnes d’engrais en quelques sortes ? C’est pas mal pour un produit secondaire.
Jean-François :
A vrai dire, pour moi c’est le produit principal. C’est même ça qui m’a poussé vers la méthanisation. Je voulais faire du bio et je trouvais incohérent d’acheter des engrais et de les faire venir par camions jusqu’à chez moi. Donc autant les produire !
Et là maintenant, tu achètes moins d’engrais j’imagine !
Jean-François :
Je n’en achète plus du tout. Et mes collègues qui en récupèrent aussi ont divisé par 2 leur facture. Sachant qu’à nous 4 on représente 1000 hectares d’exploitation. C’est des économies et est aussi des engrais de synthèses dont on évite la production
OPTIONNEL :
(Taquin) Donc finalement, tu n’es pas complètement devenu un producteur de gaz. Tu restes un agriculteur !
Jean-François :
Ça n'aurait aucun intérêt pour moi. Je vois ça comme un support à mon activité d’agriculteur. Typiquement, le fait de méthaniser sécurise un peu de revenus mais ça m’aide aussi à passer certaines parcelles en bio par exemple grâce aux engrais que je produis moi-même.
Merci beaucoup Jean-François de m’avoir accueilli. C’était un plaisir de découvrir ton travail et ton exploitation !
9 / Terrain / Conclusion /
Et bien voilà, une piste de plus pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, pour gagner en indépendance et en autonomie énergétique.
Pour l’instant la production française biométhane ne représente que 3% de la consommation nationale de gaz.
Il faut à la fois permettre à cette pratique de se répandre un peu plus sans tomber dans des excès, comme une activité agricole entièrement dédiée à production de gaz, ce qui n’aurait pas de sens.
Et puis, produire du gaz plus propre ne veut pas dire qu’il faille augmenter sa consommation. Car comme toujours lorsqu’on parle de transition énergétique : l’énergie la plus propre est celle qu’on ne consomme pas.